Miam Monster Miam is a Belgian singer who lives in Seraing (we don't pronounce the -e, so that it is /sr/), in the derelict suburbs of Liège. He's a singer (he sings in English) and sometimes reads articles for a radio programme on La Première, namely La Semaine infernale. Whenever he was present, he read his article depicting his life in Seraing…
Here's the transcription:
[…]un peu crasse qui pue entre les doigts de pied quand on enlève ses chaussettes qui me fascine dans les faits-divers.
Je commence la lecture d’une news, et je manque de strôler en avalant de travers mon spéculoos. Je vous lis : “Les pompiers sont intervenus au fond de Seraing dans la nuit de mardi vers 4h du matin : plusieurs cocktails Molotov ont été lancés sur la porte du café Century. Les dégâts sont minimes”. Quoi ? Des cocktails Molotov lancés en pleine nuit sur le Century, et on ne m’avait rien dit ? Des cocktails Molotovs au Century, le mythique café d’en face de chez moi avant que je ne déménage ? Vous vous rendez compte ? Le Century attaqué par un gang d’Albanais de Los Angeles Seraing armés de cocktails Molotov ? Le film parfait d’action de série B à la Frères Dardenne défilait alors dans ma tête…
Ah, le Century, le seul café de Belgique qui ose écrire en grand sur la porte : “Nouvelle direction, on ne vend plus de drogue”. Ça, je l’aurais bien dit, qu’à Seraing, quand on ne vend plus de drogue, on ne peut que s’attirer des ennuis, hein. Je me souviens encore le patron qui me disait : “Nous au moins, on est francs, ça c’est de la franchise…”.
D’abord, je me dis que j’ai bien fait de déménager : j’aurais pu brûler ou mourir, hein — en habitant juste à côté à l’époque. Puis je me dis que c’est la première fois que je passe à côté de quelque chose de fou, qu’il se passe quelque chose, que je passe à côté d’un spectacle excitant quoi, je me sens un peu exclu.
J’en ai vu pourtant, des trucs comiques, en regardant par ma fenêtre, là-bas. C’est vrai que l’œil est attiré par le spectacle, c’est humain. Par exemple, j’ai vu de nombreux tournois de bras de fer du dimanche qui dégénèrent en bagarres générales, avec des barres de fer prises dans les camions de Raymond le ferrailleur. J’ai vu les soirées pyjama du Century qui se terminaient en orgies hardcore bas de gamme au lavoir d’en face… Puis bon, j’ai vu des choses nettement moins drôles, aussi, hein : explosions de gaz mortelles, des chats qui se mangent les uns entre les autres… Euh, je veux dire, j’ai vu…
Raoul Reyers : Le loyer était cher ?
Miam : J’ai vu par exemple des gosses de trois ans au café à quatre heures et demi du matin avec des parents morts bourrés couchés dans leur vomi ; des deals sur la place ; enfin, des hommes politiques locaux bourrés au péket qui viennent faire leur traditionnel discours sur notre belle ville — pour ‘Seraing explose’ — devant trois poireaux encore plus soûls qu’eux et qui crient “C’est ça ! T’as raison ! Tu pues !… T’as raison, ouais, c’est ça !” Oui, c’est vrai, on appelle ça — c’est la fête des commerçants, ‘Seraing explose’, à Seraing, c’est con. Sauf qu’il y a plus de commerces, dans le fond de Seraing ! Et c’est vrai aussi qu’il y a eu deux énormes explosions dans les usines en deux ans, donc c’est bien, ce nom, ‘Seraing explose’, je trouve.
Enfin… tant qu’on a Guy Mathot… Ah oui, quoi, merde, il est plus là, lui ! Enfin… tant qu’il nous reste la limaille de fer et cette poussière qui vient des usines, et qu’il est si bon de respirer, Seraing reste Seraing ! Quoi, il y a plus ça non plus ? On ne m’aurait rien dit ou quoi ? On ferme le haut-fourneau ?
Alors il ne nous reste plus qu’à chanter comme des poireaux, et comme Francis Cabrel : “Est-ce que ce monde est sérieux ?”.
The New Yorker cartoons
6 years ago
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